Ainsi le mois dernier sortait Sunspring, expérience cyberpunk baroque, un délire hallucinogène de dix minutes entièrement scripté par une IA nommée Benjamin (enfin, c'est elle qui s'est choisi ce nom, elle était considérée comme "une LTSM" par ses concepteurs) que le réalisateur Oscar Sharp s'est chargé de réalisé pour Sci-Fi London, un festival annuel d'étrangeté qui, par exemple, propose un "48 hours movie challenge".
"Juste au-dessus du clavier de votre smartphone vit une intelligence artificielle. Elle a été entraînée à partir de nombreux SMS et d'e-mails, et essaie de deviner ce que vous voulez écrire. Nous étions curieux de découvrir ce qui se passerait si nous entraînions ce type de programme avec quelque chose d'autre ; des scripts de science-fiction." dit le carton d'introduction.
Pour se faire, Benjamin a été gavé de classiques du genre, de toutes les qualités, dans tous les styles disponibles, de 2001 aux X-Files en passant par Le Cinquème élément. Son intelligence devait lui permettre d'analyser et de prédire quelles répliques et actions devraient s'enchaîner. Oscar Sharp s'est ensuite entouré des acteurs Thomas Middleditch, Humphrey Ker et Elisabeth Gray, tous professionnels, pour donner vie à Sunspring, un huis-clos bizarre sans aucun sens dont la première réplique devrait logiquement venir d'une voix-off, avec laquelle la réponse lunaire n'a strictement aucun rapport, et où le héros vomit un oeil pour aucune raison.
Evidemment l'objectif n'était aucunement de faire un chef-d'oeuvre du 7ème art, mais de voir comment résonne une intelligence artificielle. Ses concepteurs jugent d'ailleurs son travail acceptable. Le résultat correspond selon Oscar Sharp à la moyenne de ce qu'une IA peut voir dans les films de science-fiction.
C'est exactement de ce principe que sont partis d'autres originaux, bien décidés à s'offrir une suite à la saga Harry Potter.
Le résultat, un texte en cinq parties d'environ quatre pages de long, est évidemment totalement incohérent, quoique grammaticalement très propre, et surtout fondamentalement drôle. Ce qui laisse une ouverture des plus intrigantes : avec une base de donnée suffisante, une IA est assez performante pour recouper les formes d'un langage donné et en reproduire la grammaire. Pour la syntaxe, par contre, il faut autre chose qu'un cerveau mathématique. C'est précisément ce qui gène les moteurs de traductions comme Google Trad, et un résultat similaire avait d'ailleurs été obtenu par Google (encore lui) lors d'un essai de poèmes artificiels il y a quelques semaines.
Evidemment, tout ça est en anglais, comme la majorité des trucs rigolos et cools qui traînent sur le net de l'amusement ces dernières années ('faut un algorithme littéraire français, nourri à Balzac et Zola, sérieusement, ce serait monumental...), et si les poèmes de Google sont facilement compréhensibles, le faux Harry Potter est autrement plus complexe. Heureusement, le site Actualitté a proposé à ses lecteurs de traduire ce mont d'incompréhension en français. Le résultat vaut franchement le coup d'oeil.
Je ne peux m'empêcher de vous en reproduire le début ici.
« Les Malefoy ! » dit Hermione.
Harry le regardait. Il ressemblait à Madame Maxime. Quand elle remontait à grands pas la mauvaise cage d’escalier pour se rendre visite à lui-même.
« J’ai peur d’avoir été bel et bien relevé du pouvoir, aucune chance – en effet ! » dit Rogue. Il replaça sa tête derrière eux et lut des groupes tandis que ceux-ci traversaient un coin pour voleter sur leurs lampes à encre, puis ramassa sa cuillère. La sonnerie de la porte retentit. Londres était beaucoup plus propre.
Hermione cria. La fête devait être organisée par Krum, bien sûr.
Harry se remit à collectionner des doigts, avec Malefoy. « Pourquoi, ne m’a-t-elle pas jamais dit… » Elle disparut. Et puis, Ron, remarqua Harry, avait presque raison.
« Déguerpissez, à présent, » dit Sirius, « je ne peux pas tracer une nouvelle voix. »
Il punit Oncle Vernon, si bruyamment qu’elle pouvait à peine l’utiliser avec Viktor Krum, ces visages dans un côté de leur année précédente. Une fois de plus, Monsieur Dursley était ce champion. Là, il allait donner le Rappelle-Tout… à chaque fois qu’il le ramassait, en haut de l’escalier de marbre vers Fred, qui se roulait par terre de douleur.
« Puante, lâche, crasseuse chose à calmer également, terrible – l’une était couverte d’encre étrange. »
Les cours devinrent petits et voletaient au loin de ses yeux acérés. « Lis-le à voix haute ! »
Je vous conseille de suivre cette dernière instruction devant un auditoire attentif. Les yeux qui s'écarquillent, les bouches qui se tordent et les oreilles qui se tendent de surprise et d'incompréhension valent toutes les erreurs syntaxiques du monde.
...de rien.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire